“Les élus locaux font leur pub avec l’argent du contribuable”
“Les élus locaux font leur pub avec l’argent du contribuable”
Abus Les élus locaux utilisent l’argent public pour financer leur publicité personnelle, dénonce un député qui vient de proposer une loi pour interdire ces pratiques.
Le député Jean-Pierre Giran est en guerre contre la publicité politique France Soir
Jean-Pierre Giran, député UMP du Var, est en colère : « Beaucoup d’élus locaux, des maires, des présidents de communauté d’agglomération, de département ou de région s’offrent, avec l’argent des contribuables, des pages entières de publicité à leur gloire dans la presse régionale. C’est inadmissible ! »
On a tous vu, dans les journaux de province, des publicités payantes vantant les réalisations de telle mairie, de tel conseil régional ou général, publicités accompagnées de la photo de l’élu local. « C’est doublement scandaleux, s’insurge Jean-Pierre Giran. Côté financier, une page de publicité dans un quotidien régional, c’est un budget moyen de 12.000 €. Sur une année, on arrive à des sommes énormes. Côté éthique, c’est de la propagande politique camouflée. Qu’ils soient de droite ou de gauche, beaucoup d’élus locaux l’utilisent sans états d’âme. Certains maires ou des présidents de région s’offrent même des publicités pour présenter leurs vœux à leurs administrés… Publicités payées avec les impôts ! »
Le député du Var fait remarquer qu’à l’échelon national, à la radio et à la télévision, le temps de parole des hommes politique « est mesuré à la seconde et au mot près par le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel, NDLR), tandis qu’à l’échelon régional, en presse écrite, chacun fait ce qu’il veut ».
Assainir la situation
Autre dérive du système, selon le député : « Les publicités des mairies, des départements et des régions représentent des recettes financières considérables pour la presse de province. Cela peut inciter certains journaux à la complaisance vis-à-vis des élus qui les financent. Ce n’est pas sain, d’autant que ces quotidiens sont généralement en situation de monopole dans leur région. »
Pour assainir la situation, Jean-Pierre Giran a donc déposé, hier à l’Assemblée, sa proposition de loi visant à « réglementer la publicité commerciale des communes et des collectivités territoriales dans la presse quotidienne régionale pendant toute la durée du mandat ». Certes une mairie, un département ou une région peuvent s’offrir des pages de publicité, « mais sans la photo ni le nom des élus, car l’argent public ne doit pas servir à leur promotion personnelle ».
D’une façon plus générale, Jean-Pierre Giran estime que l’on dépense trop d’argent public dans la communication. Selon nos informations, il n’est pas rare que des conseils généraux investissent jusqu’à 3 millions d’euros par an dans la publicité, entre annonces légales, marchés publics, bulletins d’information… et autopromotion des élus.
Le projet de loi de Jean-Pierre Giran a-t-il des chances d’aboutir ? Le député n’en est pas certain. « Il y aura des réticences, dit-il. Mais je veux dénoncer un dysfonctionnement français, une utilisation abusive de l’argent public, et une dérive démocratique. »
Réaction
Pierre Jeantet, vice-président du Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR), confirme à France-Soir que les collectivités locales sont de gros annonceurs pour les journaux, mais il affirme également : « Nous avons une charte éditoriale très claire, qui évite toute confusion entre publicité et articles rédactionnels. » Pour lui, « c’est aux directions et aux rédactions des journaux de résister aux pressions ». Il révèle un épisode survenu voilà quelques années à Midi libre : le président du conseil régional, Georges Frêche, furieux contre la ligne rédactionnelle du journal, avait alors annulé un budget publicitaire de 1,5 million d’euros. « C’était un coup dur. Mais cela ne nous a pas fait changer de ligne. Résister aux pressions, c’est notre devoir », dit-il.
Le chiffre 3 millions d’euros comme le budget communication de certains conseils régionaux
Par Patrick Meney
C'est sur France Soir du 02/02/2011
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